J’ai peur

Je repense à l’agression dont j’ai été témoin hier.
Ça tourne en boucle dans ma tête avec ce sentiment de peur qui m’était étranger.
J’ai déjà eu peur dans ma vie, notamment en manif ces dernières années lorsque j’étais chargé par les keufs, mais ce n’était pas la même peur.
Celle qui m’habite en ce moment est une peur paralysante, alors qu’en manif, je savais à quoi m’attendre. Je n’étais pas seul et  l’adrénaline me faisait courir pour échapper au danger.
Il y avait cette peur de se prendre une grenade ou une munition de LBD, mais rien de comparable avec ce que j’ai vécu hier.

Je revois la scène,  je marche sur ce boulevard que la circulation rend très bruyant. Je vais rejoindre ma compagne à l’hôpital – où elle doit passer des examens -, après avoir garé la voiture.
J’entends des éclats de voix par delà le fond sonore de la circulation.
Je tilte sur le mot « arabe » précédé d’une insulte « saleté d’arabe », « enculé d’arabe » ou « putain d’arabe », un truc du genre.
Ces éructations proviennent d’une voiture arrêtée au feu de l’autre côté de la chaussée (2× 3voies).
En descendent 3 passagers bodybuildés au crâne rasé.
Ils continuent à vociférer en faisant de grands gestes menaçants tout en se dirigeant vers le véhicule derrière le leur, où se trouve un type ordinaire de 40-50 ans totalement effrayé à la vue de ces nazillons.

J’ignore ce qui s’est passé en amont, peut-être une touchette, ou un incident mineur de circulation, je ne sais pas.
Je pensais qu’ils allaient secouer sa voiture et l’intimider, ce qui déjà en soi, est assez choquant.
Le premier facho, d’un coup de pied dégage le rétro, le second fait de même de l’autre côté, j’aperçois le conducteur qui se recroqueville. Le bruit des coups sur la carosserie couvre celui de la pluie d’insultes.

Je regarde complètement interdit en tendant l’oreille pour essayer de capter un « on est chez nous » ou un truc du genre, mais le bruit de la circulation et des coups ne me permet pas d’entendre leurs propos, mais ils sont de toute évidence haineux.

Le déchaînement de violence est tel que je ne vais pas aller me faire massacrer en m’interposant.

À un moment, m’effleure l’idée de sortir mon téléphone pour filmer la scène, mais je me ravise, et je suis bien inspiré car mon regard croise celui d’un nervi qui me menace physiquement en me criant un truc genre, « qu’est ce tu veux toi, tu veux t’en prendre une? »  et je suis persuadé que si j’avais filmé la scène, il aurait traversé, aurait massacré mon téléphone et que je serais en ce moment dans un lit d’hôpital.
J’ignore ce qui a provoqué ce déchaînement de violences, et ça me terrifie.
J’ai peur que ces ratonnades et ces intimidations de témoins deviennent monnaie courante.

Qu’aurais-je pu faire?

J’attendais que les nazis dégagent pour aller au moins réconforter la victime,  mais quand j’ai vu ce regard de haine sur moi et entendu ces menaces, j’ai eu vraiment peur pour mon intégrité physique.

Et j’ai dégagé.

Cette scène à duré moins d’une minute mais elle m’a bouleversé.

J’avais déjà ressenti cette haine anti arabe au moment des émeutes suite à la mort de Nahel sur les réseaux sociaux.
Ce n’étaient que des paroles, même s’il y avait déjà eu des passages à l’acte.
Mais aujourd’hui que le rn est en passe de prendre le pouvoir, toute cette haine se déverse dans la rue, et j’ai peur.

Je n’ose pas imaginer ce qui se passera si le RN gagne.

Qui nous protégera ?

Combien d’antifas face aux bataillons racistes prêts à en découdre depuis des années,  trop contents de casser du bougnoule, des nègres, des pédés et des gauchiasses ?

Tous ces fachos chauffés à blanc par les Goebbels de Bolloré et protégés par la milice de Darmanin ne se sentent plus.

Aujourd’hui je dois retourner à Marseille pour accompagner ma compagne, et je ne me sens pas rassuré.

Je m’en veux d’avoir peur, parce que c’est ce qu’ils veulent. Mais je suis saisi d’effroi.

Partagez et diffusez autour de vous ce témoignage qui montre quel sera le visage de la France, si par malheur…

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Pierre Grandmonde 27 juin 2024