Cuisine et confidences

Ça a commencé comme ça.
Un échange avec Natacha sur la page Facebook de la petite cuisine de Nat

échange Facebook du 2 avril 2024

J’aime beaucoup cette page et le blog qui s’y rattache. Depuis je l’ai découvert grâce à une copine de lutte marseillaise, je vais souvent y chercher des idées.
Tu me diras, les sites de recettes de cuisine, c’est pas ce qui manque. Il suffit de taper sur gogol recette et une liste de quelques ingrédients, et des milliers de liens te tendent les bras.

Moi, ça ne fait pas longtemps que je cuisine, je n’ai pas eu de mère ou de grand-mère qui m’a initié. C’est mon père qui, la semaine,  préparait les repas, ma mère travaillait et lui restait à la maison. Des plats simples souvent roboratifs avec comme aliment de base la pomme de terre avec ce qui poussait au jardin et ce que nous allions glaner dans les champs. Légumes accompagnés d’une tranche de jambon, d’un steak haché ou de sardines en boîte, et le soir l’inévitable soupe.
Enfin, pendant toute mon enfance le souper – là où j’ai grandi, din  ch’nord, on déjeune le matin, on dîne à midi, et on soupe le soir – c’était un bol de café au lait et deux tartines.
Ma grand tante, grand-mère de substitution cuisinait un gratin de pâtes le samedi, et le dimanche ma mère cuisinait, lorsque nous recevions, un poulet ou un lapin que nous élevions, ou un rossebiffe. Mais elle ne m’a jamais appris, de toute façon, la cuisine c’était une affaire de femmes, et puis, surtout, ça ne m’intéressait pas.

Plus tard, quand j’ai du me faire à manger, c’était le plus souvent du riz ou des pâtes avec des escalopes de volaille, ou alors des boîtes, puis quand le micro-ondes est apparu, des plats préparés.
Puis j’ai vécu pendant une vingtaine d’années avec une personne qui aimait cuisiner, la cuisine était son domaine réservé et moi, ça m’allait bien.
J’étais comme un coq en pâte.

Changement de copine, et la nouvelle n’est pas trop portée sur la chose. (Je parle de la cuisine bien sûr.)
On se bricole des trucs vite fait, le micro-ondes tourne souvent.
Parfois nous faisons une cuisine plus élaborée, mais nous travaillons tous les deux, et avons d’autres priorités.
Néanmoins je commence à utiliser des ingrédients frais comme l’ail et l’échalote pour les salades, je fais revenir des oignons pour la cuisson des légumes (surgelés).

Nous déménageons, la cuisine est plus grande.
Le micro-ondes rend l’âme, et je décide de ne pas le remplacer et de me servir du four de la gazinière. Je me lance dans la confection de tartes aux  poireaux ou aux épinards.
Je passe davantage de temps en cuisine, et ça me plait bien.

Et puis je tombe dans une dépression profonde, et bien manger est le cadet de mes soucis.
Retour au riz, aux pâtes, aux boîtes, un peu de fromage ou des yaourts et basta.
Lorsque je sors enfin de la profonde léthargie dans laquelle j »étais, j’ai un nouvel appétit de la vie et envie de faire plein de choses dont la cuisine.

J’ai donc commencé à chercher des recettes sur internet avec l’inévitable « Marmiton », t’as déjà consulté ce site ?
C’est bien fait, c’est pro, mais ce qui me fait marrer, c’est que pour chaque recette ils te proposent d’acheter le matériel.

capture d’écran d’une recette

Ils sont cons ou quoi, si je cherche une recette, c’est pour la faire avec les ingrédients que j’ai sous la main, pour aujourd’hui ou pour demain.
Comme si j’allais commander, une casserole, une cuiller en bois ou un robot-mixeur…
Je n’aime pas trop suivre les recettes à la lettre, j’en regarde plusieurs, je pique des idées à droite et à gauche et ensuite je laisse libre cours à l’inspiration et à l’improvisation.
Je suis un empiriste, mais non, bougre d’âne, je ne défends pas l’empire, je suis anar, mais adepte de l’empirisme en science comme en cuisine.
(Et je ne peux pas m’empêcher de penser à tous ces humains qui nous ont précédé et qui ont goûté, parfois au péril de leur vie, et étudié des plantes pour savoir si elles étaient comestibles ou connaître leurs propriétés médicinales, grâce leur soit rendue pour l’héritage qu’il nous ont transmis, et merci aux sorcières et à nos grand-mères)

Revenons à Natacha et sa petite cuisine.
Ce qui me plaît, ce sont les souvenirs qu’elle évoque, ses anecdotes sur les aliments, sur l’origine des recettes qu’elle va rechercher dans de vieux bouquins, sa façon de ne pas se prendre la tête, de faire de la bonne cuisine sans y passer la journée. Le tout raconté avec truculence et humour.

Même si tu ne cuisines pas, la lecture de son blog est un plaisir, on y apprend des choses sérieuses (par exemple, dans sa recette de tapenade le procédé chimique qui noircit les olives que tu retrouves souvent sur tes pizzas) on y lit des anecdotes savoureuses, et sa bonne humeur transparaît à chaque ligne.
Ses nombreuses recettes végétariennes du pourtour méditerranéen (Mais il lui arrive de s’aventurer plus loin avec par exemple des recettes indiennes) sont pour moi très inspirantes.
Mais si tu aimes la viande, elle a aussi des recettes qui te plairont sûrement.
Et aussi j’aime sa philosophie anti-gaspi.

Et elle est très sympa et interagit avec ses fauloilleures.
Bref, comme je la pille allégrement, je relève le défi et vais tenter de lui rendre modestement la pareille avec une recette à base de manioc.

Pour moi, le manioc était un légume africain, j’ai toujours entendu dire que c’était un des aliments de base des pays d’Afrique subsaharienne. C’est vrai mais ce que j’ignorais, c’est qu’il est comme bon nombre de nos fruits et légumes originaire d’Amérique où il fut découvert vers 1500 et importé en Afrique qu’en 1580.

Tu vas me dire, si j’y connais rien au manioc, (enfin, grâce à ces recherches j’en sais un peu plus) pourquoi j’en ai acheté ?
J’y suis pas pour grand chose, c’est la faute à Jojo.
Jojo, c’est mon pote du marché, je vous en ai déjà parlé.
Je ne sais pas comment il se débrouille, mais chaque semaine il déballe ses fruits et légumes exotiques à des prix défiant toute concurrence.
Selon ses sources d’approvisionnement et les arrivages, je ne sais jamais ce que je vais trouver sur son stand
Avocats, mangues, ananas, papaye, fruits de la passion, gingembre, citrons verts, patates douces, kiwanos, grenades, pomelos de Chine …
Souvent il me donne une caisse de fruits trop murs pour que je fasse des jus, des confitures, du guacamole, et il me sert toujours très largement.

28 Euros … et du boulot en perspective

Je n’étais pas spécialement intéressé par le manioc, mais il me les a glissés dans mon chariot de courses, et maintenant je m’interroge sur la façon de le cuisiner.J’ai consulté quelques sites, beaucoup proposent de faire de la purée, mais ça manque d’originalité.
Tout d’abord, j’ai prélevé un morceau que j’ai cuit à la vapeur pour connaître la saveur et la consistance de ce légume et réfléchir à  quoi je pourrais bien le marier.

Tranches de manioc après 10 minutes de cuisson vapeur

J’avais commencé par éplucher la racine avec un économe, mais le manioc a une solide écorce qui se détache fort bien après 10 minutes de cuisson à la vapeur.
Je me décide à faire une tarte, car le lendemain je pars en rando et il me faut préparer un pique-nique.
Je découpe donc les légumes en tranches à la vapeur, je fais de même avec quelques carottes car je m’aperçois qu’elles sont en train de s’abîmer et que comme dirait Guy Roux, qui n’était pas cuisinier mais entraîneur de fouteballe à  Auxerre « faut pas gâcher ».
Pendant ce temps, dans un fait-tout (ustensile qui porte bien mal son nom parce qu’il ne fait rien et que c’est au cuistot de tout faire, c’est pas un thermomix ®! )  je fais revenir un oignon jaune (mais où était-il parti ?) dans un fond d’huile pendant 5 minutes, puis j’ajoute une échalote et un oignon rouge et quelques épices.
Piment doux, paprika, cumin, curry, curcuma, gingembre, poivre et je sale.
Je te conseille de faire selon ton goût.
Je rajoute un peu d’eau (10 cl) et laisse mijoter une dizaine de minutes.
Après quoi je mets les légumes avec de l’ail, des herbes de Provence de l’origan et de la coriandre fraîche (que j’ai achetée pour faire un plat que Nat a proposé).
Je mélange le tout rajoute du lait de coco  (20cl) et laisse mijoter une demi heure à feu doux, je couvre et je  viens remuer de temps en temps. Je laisse cuire jusqu’à ce que les légumes deviennent fondants.
Ne reculant devant rien, tant qu’à faire dans l’exotisme, je rajoute une mangue coupée en petits dés.
Je te l’ai dit plus haut, je laisse une grande part à l’improvisation, aussi, je goûte et je rajoute des ingrédients, c’est pourquoi il m’est difficile de donner une recette à celles qui m’en réclament parfois lorsque j’instagramme *  des photos de mes préparations culinaires.

Parallèlement, je fais mon appareil : 4 œufs,  sel, poivre, noix de muscade râpée, 100 grammes de fromage, lui aussi râpé, -mais pas par mes soins – (mélange comté, maasdam,emmental) et aussi une demi boule de mozzarella, deux portions type « vache qui rit » et 50 grammes de fromage de chèvre.

Je te donne pas les mesures au gramme près, je fais en sorte d’avoir un appareil pas trop liquide.
Je prends une pâte feuilletée, tu peux la faire toi-même si ça t’amuse, mais,la confection des pâtes ne me passionne pas.
Je la pique à l’aide d’une fourchette avant de la déposer dans la tourtière et je la badigeonne de pesto.
Je mélange les légumes et l’appareil, comme c’est un peu trop liquide, je rajoute une poignée de semoule de blé qui va absorber.
Hop, je rajoute de la chapelure et c’est parti pour 40 minutes de cuisson thermostat 7.
Un petit truc, au bout de 25 minutes, je sors la tarte pour la piquer avec la pointe d’un couteau pour parfaire la cuisson, et je réenfourne.

Et voilà le résultat

Bilan de cet essai, une réussite, mais un peu trop sec.
Le manioc rend beaucoup moins d’eau que les poireaux, les épinards ou la courge, légumes que j’utilise d’habitude, j’aurai pu réduire le temps de cuisson ou m’abstenir d’ajouter des graines de couscous.

C’est bien beau tout ça, mais c’est pour demain.
Et il me faut aussi préparer un repas pour ce soir, et j’opte pour cette recette de velouté d’asperges, vu que j’en ai mangées à midi en m’inspirant de cette recette ci et que j’ai des restes, mais j’y reviendrai plus tard.

Attends, c’est pas fini.

Le pique-nique, tarte au manioc accompagnée d’une salade verte-carottes-betteraves agrémentés de la cueillette du jour (asperges,nombril de Vénus, pétales de ciste cotonneux**)

J’ai le défaut de ne pas savoir cuisiner en petite quantité, – tu remarqueras que c’est pareil pour l’écriture, j’en fais des tonnes ! – et il me reste pas mal de mixture, et je me rappelle une recette de Nat et décide de l’adapter.

Je rajoute un peu de farine (une cas) deux oeufs, au jugé, il m’en faudrait deux de plus, en bas de chez moi il y a un  Carrefour market, mais je boycotte cette enseigne. Il y a un supermarché à 3 kilomètres, hors de question que je prenne la voiture, empreinte carbone oblige, et je n’ai pas le temps d’y aller à vélo.
Je verse un centimètre d’huile dans une poêle, je fais chauffer et à l’aide de deux cuillers je dépose des petites galettes…
…qui s’éparpillent dans l’huile.
J’ai fait avec les moyens du bord, et le résultat n’est pas terrible.
« Le petit monde de Pierre » le premier blog de recettes ratées !

Une sorte de croustillade, mangeable mais pas très présentable.

Heureusement la sauce est délicieuse

Sur ce constat, je garde mon mélange sous le coude et le mets au frigo. (Le mélange, pas le coude!)
Le lendemain, je vais acheter des oeufs, j’en incorpore deux avec un peu de farine et le résultat est bien plus satisfaisant.

c’était très bon cette fois-ci

J’en reviens à mon velouté d’asperges,


Effectivement, il y a beaucoup de fils et comme je n’ai pas de moulinette à ma disposition, je fais preuve d’imagination en utilisant un petit bocal à épices et une passoire.

Moulinette improvisée

Résultat, une tuerie !

Pour terminer, cette mise en bouche, je t’ai parlé d’un plat pour lequel j’avais acheté de la coriandre fraîche.
Si tu as,suivi le lien tu as vu qu’il s’agit d’une recette de soupe de lentilles corail au cumin.

Et là encore…

Miam

Bon appétit les amis et les copines.

*le plus souvent sur facebook, mais on ne dit pas facebooker…
**pas sûr que ce soit comestible, mais ça fait joli, et je n’ai pas été malade.

Et un énorme merci à Natacha

©Texte et photos Pierre Grandmonde 9 avril 2024

3 commentaires

  1. Pingback: Plus rien ne m’arrête | le petit monde de Pierre
  2. bleufushia · avril 9

    Bien sympa, vivant, attachant, cet article.
    Et comme je suis la goûteuse number one, je confirme, c’est très bon, tout ça, je me régale 🥰

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  3. Anonyme · avril 9

    mais que tu es mignon toi ! mille mercis pour ce partage, cet hommage, cet ode même devrais-je dire ! en tout cas je suis ravie de t’inspirer, je vais sans doute me laisser tenter par quelques essais de manioc maintenant 😉

    Nat

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